La domination quasi sans partage des Golden State Warriors lors des 5 dernières années a profondément marqué la NBA. Au-delà de l’avènement d’un style de jeu (le small ball), les Californiens ont également ouvert la voie à un rythme de jeu toujours plus rapide. Ce développement spectaculaire du jeu de transition constitue-t-il une simple tendance passagère ou un prérequis indispensable à toute équipe qui ambitionne d’aller chercher un titre ? La rédaction d’Au Stade s’est penchée sur la question.
Nous nous accorderons tous à dire que l’on peut associer à chaque époque un certain nombre d’éléments caractéristiques. Cela est également vrai dans le sport, particulièrement au basket. Du jeu rugueux pratiqué notamment sur la côte Est des Etats-Unis dans les années 1990 à l’ère du tir à trois points dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui, les façons de jouer au basket ont grandement évolué au cours du temps.
Parfois laissé de côté et peu médiatisé par rapport à d’autres statistiques, le rythme de jeu (aussi appelé pace de l’autre côté de l’Atlantique) nous en apprend pourtant beaucoup sur les évolutions du jeu. Alors que le jeu physique et la culture défensive des années 1990 favorisaient particulièrement un rythme « lent », cette conception a peu à peu été bouleversée. Plus que cela, la tendance s’est complètement inversée au cours des années 2000.
NBA: un rythme de jeu toujours plus élevé
En effet, depuis le début du nouveau millénaire, le rythme de jeu ne fait qu’augmenter année après année: par exemple, lors de la saison 1998-1999, chaque équipe jouait en moyenne 88,9 possessions par match. A titre de comparaison, ce chiffre s’élevait à 100 possessions la saison dernière. Cette accélération spectaculaire du rythme de jeu peut s’expliquer par différents facteurs. D’une part, les athlètes n’ont jamais connu un accompagnement aussi important dans leurs performances (préparation physique et mentale, récupération, personnalisation des programmes etc.).
D’autre part, les joueurs du secteur intérieur, traditionnellement lents et peu mobiles, laissent petit à petit place à une nouvelle génération aussi solide physiquement, mais bien plus mobile et rapide. Enfin, dans une simple logique tactique, il apparaît plus simple de marquer en remontant rapidement la balle après une récupération contre une défense pas replacée que lors d’une situation sur demi-terrain.
En ce sens, on remarque depuis quelques années que de nombreuses équipes (Atlanta, New Orleans, Milwaukee, Houston…) tentent à leur tour de développer ce jeu de transition qui a fait le succès des Golden State Warriors. Mais ce rythme de jeu effréné constitue-t-il forcément la meilleure option pour remporter le titre de champion à l’heure actuelle ? Apporte-t-il à lui seul une garantie en termes de résultat ?
NBA: jouer plus vite pour gagner plus ?
Les premiers éléments de réponse à ces interrogations semblent assez contrastés. Tout d’abord, nous avons pu voir que la mise en place d’un jeu offensif basé sur la transition a eu des effets bénéfiques pour certaines équipes « faibles ». En effet, devant la difficulté de mettre en place un système défensif efficace, certaines équipes ont décidé d’augmenter leur vitesse de jeu pour compenser leur faible défense par une plus grand efficacité offensive. Encaisser 115 points par match ? Ce n’est pas un problème lorsque l’on peut en marquer 120.
Ainsi, certaines équipes qui ne parvenaient pas à trouver une identité de jeu jusque-là ont vu leurs résultats s’améliorer à la suite de la mise en place d’un jeu offensif rapide. Cette saison, New Orleans, Memphis ou encore Washington ont réussi à s’extirper du fond du classement de leurs conférences respectives pour se rapprocher des places qualificatives pour les playoffs. Nous pourrions donc être tentés de dire que le jeu de transition va s’imposer comme le style de jeu de référence dans les prochaines années. Mais il nous reste à voir si cela se confirme au plus haut niveau de la compétition.
Jeu de transition: des limites certaines au plus haut niveau
Lorsque l’on se concentre sur le haut du classement, une équipe base particulièrement son identité sur un jeu offensif flamboyant avec de l’intensité et un rythme élevé: les Houston Rockets. Pourtant, lorsque l’on fait le bilan des dernières années de cette équipe, un constat terrible s’impose. Malgré un coach reconnu depuis des années pour son style offensif explosif (Mike D’Antoni), un meneur impulsant une intensité folle (Russell Westbrook) et un scoreur parmi les plus efficaces à l’heure actuelle (James Harden), aucun nouveau titre n’est venu garnir un palmarès vierge depuis 25 ans. Pire, cette équipe, qui symbolise pourtant l’importance grandissante accordée à l’attaque en NBA, n’est même pas parvenue à décrocher une finale.
C’est sans doute là que se trouve la limite de l’application stricte d’un jeu de transition: lorsque le niveau s’élève, les défenses se font plus dures, les replis défensifs plus rapides et il est compliqué pour les joueurs de bénéficier des espaces nécessaires pour marquer rapidement. Les paniers seront donc plus difficiles à aller chercher et il devient plus compliqué de combler les lacunes défensives par un jeu offensif ralenti. C’est ainsi que les Houston Rockets, toujours auteurs de saisons régulières splendides ces dernières années mais incapables d’élever leur niveau défensif ou de trouver des alternatives à leur jeu de transition lorsque le rythme du match l’impose, ne parviennent pas à aller au bout.
NBA: la perfectibilité du seul jeu de transition
Finalement, lorsque l’on étudie les statistiques des dernières années en NBA, on observe plusieurs éléments: les attaques n’ont jamais été aussi prolifiques, tout comme le jeu n’a jamais été aussi rapide. Cette tendance à accélérer le rythme de jeu s’est fortement développée ces dernières années dans le sillage de la domination des Golden State Warriors.
S’il est adopté par un nombre grandissant d’équipes et qu’il constitue une option offensive intéressante, le jeu de transition n’en reste pas moins perfectible et il ne se révélera véritablement efficace que s’il est associé à d’autres fondamentaux du jeu, comme la défense ou la capacité à mettre en place des systèmes sur demi-terrain. Certaines équipes comme les Los Angeles Clippers ou les Milwaukee Bucks ont trouvé cet équilibre et semblent aujourd’hui les mieux placées pour dominer la ligue à court terme. Une chose est sûre: les amateurs de basket offensif et spectaculaire auront encore de quoi se régaler dans les prochaines années.
Crédits photo à la Une: Lindsey Turner