Façonné par un passé tumultueux, le soccer canadien a longtemps été cantonné à un rôle mineur sur l’échiquier continental, dans l’ombre du soccer américain. Cependant, la jeune et prometteuse Canadian Premier League, officiellement lancée en 2017, entend bien faire bouger les lignes et contre-carrer, à long terme, les desseins de la MLS voisine. Décryptage.
Soccer canadien: une histoire chaotique dans l’ombre de la MLS
Le soccer commence à se structurer progressivement au Canada à partir de la fin du XIX siècle, mais surtout à partir de 1926 et la création d’une ligue professionnelle: la National Soccer League (NSL). Pourtant, durant des décennies entières, le soccer canadien va balbutier, bon an mal an, tendant davantage vers le semi-professionnalisme que vers le professionnalisme. En ce sens, l’année 1968 demeure une véritable rupture: la North American Soccer League (NASL) voit le jour, en d’autres termes une ligue nord-américaine de soccer réunissant des équipes à la fois venues des États-Unis et du Canada (notamment et surtout des équipes de l’Ontario à vrai dire). Cette compétition, éminemment bien structurée et viable économiquement, permet aux joueurs canadiens d’affronter des stars du football mondial en fin de carrière (Pelé, George Best, Beckenbauer etc.) qui évoluent dans des équipes américaines.
Cependant, cette NASL revêt une conséquence pernicieuse pour le soccer canadien: la fuite de ses talents. En effet, les jeunes pousses nationales quittent rapidement leur berceau, recrutées par des franchises américaines aux infrastructures particulièrement développées et aux contrats alléchants. A tel point qu’en 1987, Canada Soccer (l’association nationale de soccer professionnel, sorte de LFP à la canadienne) décide de quitter la NASL pour fonder sa propre ligue: la Canadian Soccer League (CSL). Un véritable échec.
La résurgence du soccer canadien
Ainsi, de la fin des années 1980 et la création de la CSL à la décennie 2010, le soccer canadien traverse une véritable traversée du désert, entre succession de ligues professionnelles toutes plus éphémères les unes que les autres et faillites de clubs récurrentes. Seulement, 2017 est l’année du renouveau pour le soccer canadien: Canada Soccer annonce la création d’une nouvelle ligue, qui se veut à la fois viable et durable: la Canadian Premier League (CPL). En effet, il est vrai que la demande, auprès des canadiens amateurs de football, se faisait de plus en plus grandissante, symbolisée par l’attraction autour des paris sportifs ou encore les casinos en ligne au Canada.
D’ailleurs, pour garantir sa viabilité dans le temps, il a été décidé que la jeune Canadian Super League serait assistée d’une institution économique, la Canadian Soccer Business (CSB) chargée de veiller à la solvabilité des clubs (contrôles financiers annualisés, commissions décentralisées etc.) tout en développant l’économie de la ligue (droits TV, contrats publicitaires, naming etc.). Car l’ambition de Soccer Canada, par le lancement de la CPL est claire: concurrencer à long terme le soccer américain, la MLS (Major League Soccer).
Concurrencer la MLS
Nul ne peut nier que le défi semble de taille. Soit, les ambitions ne manquent pas du côté canadien, mais une réalité demeure: la MLS, avec ses 25 saisons d’expérience, ses 26 clubs professionnels répartis en deux associations (sur le modèle des Conférences en NBA) et son milliard de dollars de valorisation marchande, semble encore hors de portée pour la Canadian Super League.
A cet égard, il est vrai que la CSL, éminemment ambitieuse sur le papier, n’est composée dans les faits que de sept franchises, toutes nouvelles à l’exception d’une seule – le FC Edmonton, club vestige d’un passé tumultueux. Nombreux sont d’ailleurs les observateurs avisés, notamment un blog des sites de jeux en ligne, qui dressent ce constat, non sans regret. D’ailleurs, depuis la décennie 1990, les trois franchies canadiennes les plus ambitieuses ont toutes fait le choix de rejoindre la MLS américaine (l’Impact de Montréal, le Toronto FC et les Whitecaps de Vancouver). En ce sens, force est de constater que la résurgence du soccer canadien semble pleine de promesses, qui plus est au regard de son passif; pour autant, le chemin semble encore long pour la prometteuse Canadian Super League avant d’envisager de contre-carrer les desseins hégémoniques de l’inévitable Major League Soccer.
Crédits photo à la Une: Coastal Elite from Halifax, Canada