Sport médiatique par excellence, le football suscite la convoitise du grand banditisme. Attiré par l’appât du gain, la mafia y tisse sa toile en toute discrétion en dehors des terrains.
Dolores Aveiro, la mère de Cristiano Ronaldo, en aurait-elle trop dit? Le 1er novembre, elle a déclaré au sujet des autorités du ballon rond: « Une mafia dans le football existe. Si vous voyiez tout ce qu’il se passe, vous vous rendriez compte que c’est une mafia. » Devant cette affirmation, la rédaction d’Au Stade s’est donc demandée si un lien entre le football et le grand banditisme existe.
Les paris sportifs, un lien direct
Les paris sportifs brassent de l’argent. Ainsi, sept jours après le début du Mondial-2018 en Russie, le spécialiste des paris sportifs et fondateur de CK Consulting, Christian Kalb, estimait pour Ouest-France « entre 600 et 700 millions d’euros » le montant des mises enregistrées uniquement en France durant la compétition. Cette somme atteint 50 milliards d’euros à travers le monde. Face à ces chiffres, la mafia à l’échelle mondiale y voit donc un intérêt financier. Cela est d’autant plus vrai qu’en 2012, l’inspecteur UEFA Kharl Dhant a déclaré dans l’émission Comment la mafia truque le foot que le revenu mondial des paris sur le sport était compris entre 200 et 500 milliards de dollars par an. En pariant sur les équipes les plus faibles et en truquant les matchs les moins médiatisés pour ne pas éveiller l’attention afin qu’elles l’emportent, les membres du grand banditisme peuvent donc empocher énormément d’argent. En truquant des matchs du FC Thoune (Suisse), des mafieux ont encaissé 90 000 euros en 2009; ils auraient reversé 7 000 euros à l’attaquant Pape Omar Faye pour s’assurer la défaite de son propre club.
Si le sujet du lien entre la mafia et le football semble tabou, Gianni Infantino, le président de la FIFA, ne nie pas son existence. « Ils s’attaquent aux jeunes plutôt qu’aux stars car ils sont moins bien rémunérés, lâche-t-il dans cette même émission […]. On monitor 29 000 matchs par an, toutes ligues européennes confondues« . Toutefois, d’après Chrisitan Kalb, cette surveillance n’empêcherait pas le trucage de matchs prestigieux. Certaines rencontres du Mondial-2014 seraient effectivement, selon lui, soupçonnées de corruption.
La mafia dissimulée chez certains agents sportifs
Dans le football, la mafia ne se limiterait pas uniquement au trucage de certaines rencontres. Dans le livre Les parrains du foot (2018) trois journalistes l’affirment. À l’occasion de sa sortie, deux d’entre eux, Brendan Kemmet et Stéphane Sellami confient à Europe 1 que certains escrocs approchent aussi les stars du football. Leur objectif est alors souvent de devenir agents sportifs afin d’amasser de l’argent. Pour le prouver, les deux journalistes évoquent le cas de Blaise Matuidi. En 2013, alors qu’il évolue au PSG, un « caïd » de Saint-Denis a tenté de l’approcher. « C’est un homme connu de la police […] qui met tout en oeuvre pour essayer de prendre la carrière de Blaise Matuidi en main, déclare Stéphane Sellami. Il est en contact avec lui via l’un de ses amis qui était chargé de communication dans une boîte de nuit« . Le joueur déclinera cette proposition. Difficile cependant de savoir avec précision combien de footballeurs se laissent quant à eux duper. Dans cet univers, la loi du silence prévaut. Pour Brendan Kemmet, cela est d’autant plus vrai que les escrocs « sont des intimes » des joueurs.
En conclusion, les termes mafia et football sont étroitement liés. Dolores Aveiro voulait probablement uniquement justifier que son fils mérite, selon elle, davantage de récompenses sportives individuelles. Elle a cependant mit le doigt sur un sujet embarrassant pour la FIFA. La fédération condamne effectivement l’imbrication de la mafia dans le football mais ne parvient actuellement pas à l’éradiquer.
Crédits photo à la Une: Ungry Young Man