Que retenir de la saison de Tom Dumoulin à part qu’elle fut parfaite, parfaite dans le sens où le Néerlandais a réussi les objectifs qu’il s’était fixé. Et de quelle manière ! Avec le premier Grand Tour et le premier titre de champion du Monde du contre-la-montre individuel de sa carrière, Dumoulin avance désormais vers 2018 en tant que prétendant à la victoire au Tour de France.
2017, l’année de la confirmation
Peut-on réellement parler de confirmation pour un coureur que nous connaissons depuis déjà quelques années ? Pas vraiment, même si l’année 2017 fut pour Tom Dumoulin celle où ses caractéristiques et son travail ont réellement prouvé quelque chose, à savoir: gagner. En effet, hormis des étapes, certes pas des moindres (cinq victoires en Grands Tours avant 2017), on attendait de lui un coup d’éclat sur des courses par étapes. Médaillé de bronze sur le contre-la-montre individuel des championnats du Monde de Ponferrada en 2014, le Néerlandais y avait révélé des qualités qu’on lui connaissait déjà après de prometteuses mais pas écrasantes performances en espoirs sur la discipline.
C’est finalement la Vuelta 2015, lors de laquelle Tom Dumoulin fait étalage d’impressionnantes qualités en montagne, qui va permettre au grand public de connaître le coureur sous un profil qu’il ne lui prêtait pas alors: le grimpeur. Ce même public attendra deux ans avant de le voir remporter son premier Grand Tour. Il faut dire que malchance il a eu sur le Giro 2016 où il prétendait à la victoire: il abandonne lors de la onzième étape après avoir remporté le contre-la-montre inaugural et porté le maillot rose six jours. Ce ne fut donc que partie remise pour celui qui a parfaitement géré son Giro 2017. Avec ses 69 kilomètres de contre-la-montre au total, le parcours était taillé pour Dumoulin qui a écrasé le premier chrono individuel pour s’emparer du rose à Montefalco, ne perdant la précieuse tunique que pendant deux jours au profit d’un Nairo Quintana dépassé sur l’ultime contre-la-montre vers Milan. C’est grâce à sa gestion en montagne, quasiment chirurgicale, que Dumoulin a pu contenir son retard pour s’octroyer à la victoire finale.
Tom Dumoulin: un profil atypique mais terriblement complet
Deuxième du chrono final du Giro derrière Jos Van Emden, le coureur du team Sunweb n’a presque pas tremblé alors qu’il partait pourtant de la quatrième place à Monza, une performance historique sur un Grand Tour. Le profil de Dumoulin interpelle donc, lui qui est loin d’être le meilleur grimpeur mais qui profite de ses capacités dans l’exercice solitaire pour être un sérieux concurrent, si sérieux que beaucoup le voient déjà batailler avec Chris Froome sur le prochain Tour de France. Gestionnaire dans les ascensions, il préfère les longs cols où il peut monter à son rythme sans devoir fournir un effort aussi intense que celui qu’il pourrait fournir sur une ascension courte et sèche. C’est pourquoi le Tour de France peut lui convenir, plus que la Vuelta où il avait montré ses limites en troisième semaine en 2015.
Dumoulin ne cherche jamais à suivre les attaques car il sait pertinemment que cela le mettrait dans le rouge. Il revient au train tel un pur grimpeur-rouleur qui s’inscrirait dans la tradition des Miguel Indurain et Cadel Evans. L’exemple symptomatique et qui appelle à faire date est sa victoire sur la 14e étape du Giro cette année. Sa performance ce jour-là est un chef-d’œuvre du genre, un chef-d’œuvre selon son profil et son modèle de course. Ainsi dans l’ascension finale d’Oropa, Tom Dumoulin, maillot rose sur les épaules, a écœuré Nairo Quintana en répondant à toutes ses attaques, avant de finir en patron sur le dernier kilomètre où il a fini par distancer le colombien avant de déborder Ilnur Zakarin dans la dernière ligne droite, parachevant une tactique extraordinaire répondant bien au sang-froid dont semble faire preuve le Néerlandais. Cette victoire est formatrice car elle montre parfaitement l’évolution de Dumoulin sur les deux dernières années, notamment son évolution mentale, un mental qui lui avait fait défaut lors du final de la Vuelta 2015 et qui s’est révélé être un précieux allié sur le final du Giro 2017.
Tom Dumoulin n’oublie pas le contre-la-montre
Avec ces progrès considérables en montagne et cette capacité à gérer sa physionomie corporelle à l’image d’un Bradley Wiggins, on omettrait presque le fait que Tom Dumoulin est aujourd’hui l’un des meilleurs rouleurs du peloton, si ce n’est peut-être le meilleur. Et sa saison 2017 a été construite autour deux objectifs qui mettent à profit ses caractéristiques de rouleur-grimpeur: le premier est le Tour d’Italie qu’il a remporté et le second concerne les Mondiaux de Bergen… qu’il a survolés. Et c’est là où l’on peut dire que la saison 2017 de Dumoulin est un modèle de gestion absolument remarquable. Le Néerlandais a atteint ses deux pics de forme au moment où il le voulait. Avec deux médailles d’or à Bergen, il a marqué de son empreinte cette édition 2017 des championnats du Monde de cyclisme sur route.
Son premier titre, il l’a obtenu lors du contre-la-montre par équipes avec le team Sunweb, devançant les BMC de huit petites secondes. Mais c’est lors de l’épreuve individuelle qu’il a éclaboussé la course de tout son talent. Avec un parcours difficile et une arrivée au sommet du mont Fløyen, le tracé était fait pour Dumoulin – ou Froome. Et le néerlandais n’a pas déçu, écrasant la concurrence et reléguant son dauphin, Primoz Roglic, à 57 secondes ainsi que Chris Froome, troisième, à 1’21’’. On a donc un coureur qui progresse en montagne, mais aussi en contre-la-montre avec un premier titre mondial dans la discipline après le bronze en 2014 et l’argent à Rio aux JO 2016. Plus que jamais complet, Dumoulin s’avance désormais vers une saison 2018 où son principal objectif sera le Tour de France, se présentant sans doute comme le coureur le mieux à même de déloger Chris Froome du trône qu’il occupe depuis trois ans.
Crédits photo à la une: Elise Chauveau