Coéquipier de Thibaut Pinot sur le Tour d’Italie 2017, Matthieu Ladagnous (FDJ), 32 ans, a accepté de répondre aux questions d’Au Stade. Alors que le Giro vient de s’achever, le Palois s’est notamment confié sur sa carrière, son avenir, sans oublier d’aborder la quatrième place de son leader. Entretien exclusif.
Au Stade: Pour commencer cette interview, peux-tu te présenter brièvement à nos lecteurs ?
Matthieu Ladagnous: Je m’appelle Matthieu Ladagnous, j’ai 32 ans, et je suis coureur cycliste professionnel au sein de l’équipe FDJ depuis douze ans.
La semaine dernière tu arpentais les routes italiennes pour le centième Tour d’Italie. Coéquipier de Thibaut Pinot sur cette compétition, tu as terminé 97e au classement général final. Comment t’es-tu senti durant les trois semaines de course ?
J’ai eu de bonnes sensations, surtout que je n’étais pas spécialement prévu sur ce Giro. Je n’avais pas fait la préparation idéale, mais je me sentais de mieux en mieux au fur et à mesure des trois semaines de course. J’ai fait mon boulot auprès de Thibaut, on a réalisé une belle course.
Ton leader, Thibaut Pinot donc, a terminé au pied du podium. Comment analyses-tu sa performance alors qu’il avait affirmé que le Giro était son « objectif numéro un » ?
En effet, c’était son objectif numéro un, et il a réussi son pari puisqu’il a terminé quatrième. Même si son but était de finir sur le podium, le résultat final est plus que réjouissant à la vue de la grosse concurrence présente sur ce Tour d’Italie. Il n’a pas démérité, il gagne une étape et termine quatrième au général. Thibaut a réussi son Giro, c’est super.
Thibaut a réussi son Giro, c’est super »
Matthieu Ladagnous
Selon toi, que lui manque-t-il pour passer un cap et gagner un Grand Tour ?
Il lui manque de ne pas être malade sur une étape, déjà. Après, les circonstances de course ne nous étaient pas forcément toujours favorables, tandis que le niveau s’est vraiment resserré au général. Ce n’était pas évident. Sur le contre-la-montre, il pourrait peut-être un peu progresser, pour devenir encore plus complet je pense.
Cette saison, l’équipe FDJ fête ses vingt ans d’existence. Quels changements ont été mis en place depuis que tu la composes ?
Lors de mes premières saisons à la FDJ, il n’y avait pas vraiment de leaders désignés: pas de vrais sprinteurs, ni de vrais grimpeurs en fait. Désormais, tout est bâti autour d’un leader. Pour survivre au plus haut niveau professionnel, il fallait forcément se professionnaliser année après année.
En 2013, tu avais signé de loin la meilleure saison de ta carrière en terminant notamment cinquième de Gand-Wevelgem et sixième du Tour des Flandres. Avec le recul, ces performances t’avaient-elles permis de passer dans une autre dimension au sein du peloton ?
J’ai toujours aimé ce genre de courses, mais j’ai souvent manqué de réussite malheureusement. Cette année-là, j’avais très bien bouclé ma saison de classiques, c’est vrai. Désormais, je me situe plus dans un rôle de coéquipier.
Tu as déjà participé à six reprises au Tour de France. Seras-tu de la partie, cet été, pour épauler Thibaut Pinot ?
Non. Cet été, au mois de juillet, je devrai rester à la maison, tranquille.
L’an passé, tu avais abandonné lors de la neuvième étape…
J’étais malade, pris d’une gastro-entérite. J’avais été contraint d’abandonner, malheureusement.
Thibaut Pinot avait abandonné lui aussi, à la suite de quoi il avait essuyé de nombreuses critiques, notamment sur le fait qu’il ne supportait pas la pression, qu’il était surcoté… Ces critiques étaient-elles fondées ?
Non, pas du tout. Quand on est malade, on n’y peut rien malheureusement. Personnellement, avec ma gastro ce n’était pas possible de continuer, alors Thibaut et son virus… Après, c’est sûr que sur le Tour il y a une grosse pression, mais je pense que Thibaut a prouvé cette année avec le Giro qu’il était capable de résister à la pression.
Cette saison, la concurrence pour le classement général des Grands Tours s’est encore un peu plus accrue. Désormais, chaque équipe du WorldTour semble être capable de jouer le général…
Tout à fait. Là, sur le Tour d’Italie, il y avait au moins six gars qui étaient capables de gagner le général. Tout se joue sur des petits détails, mais c’est sûr que l’étau se resserre entre les leaders. On n’assiste plus à la même dominance de quelques coureurs comme auparavant.
On n’assiste plus à la même dominance de quelques coureurs comme auparavant »
Matthieu Ladagnous
Quel regard portes-tu sur les multiples réformes du WorldTour mises en œuvre ces dernières années ?
On fait avec (rires). Maintenant, il ne faut pas oublier les petites courses françaises qui permettent à de plus petites équipes d’exister. S’il n’y avait que des courses WorldTour, ça serait la mort des manches de coupe de France, des équipes françaises de niveau plus modeste etc. Concernant le calendrier, il s’est alourdi, c’est certain. Mais les équipes WorldTour ne sont pas obligées de participer à toutes les courses.
Depuis tes débuts chez les professionnels, il y a douze ans maintenant, tu appartiens à l’équipe FDJ. A désormais 32 ans, n’as-tu pas envie d’aller voir ailleurs ?
Jusqu’à présent non, je suis très bien à la FDJ. Après, je ne dis pas que je vais y rester jusqu’à la fin de ma carrière, mais on avisera selon ce qu’on me propose, notamment au niveau des objectifs à atteindre. Pour le moment, je n’ai pas songé à partir, mais cela dépendra aussi de ce que l’on me propose ailleurs.
Crédits photo à la une: Elise Chauveau