La catastrophe de Furiani est l’évènement le plus tragique ayant eu lieu dans un stade après-guerre en France. Le 5 mai 1992, l’effondrement d’une tribune du stade Armand-Cesari de Bastia a causé la mort de 18 personnes, peu avant la demi-finale de Coupe de France entre Marseille et Bastia. Ce drame a été la conséquence fatale de petits arrangements, de décisions prises à la va-vite et surtout de l’aveuglement des pouvoirs publics.
Le SC Bastia n’est actuellement plus dans l’élite du football français. Toutefois, si vous êtes un inconditionnel du football corse, vous pouvez continuer de miser sur les matchs de l’AC Ajaccio, l’ennemi juré du club bastiais. En ce sens, PMU offre par exemple un bonus sport de 100€ à tous les nouveaux joueurs de sa plate-forme; pour en profiter, il suffit de perdre son premier pari. Pour plus d’informations, suivez ce lien. Pour comprendre ce qui a mené à la catastrophe, il faut revenir sur les tractations qui ont eu lieu entre la commission de sécurité, la Ligue de football corse et l’entreprise chargée des travaux. Comme nous allons le voir, l’effondrement de la tribune n’est pas dû au hasard. Elle aurait largement pu être évitée. Qui sont les protagonistes de l’histoire ? Quelles ont été leurs responsabilités dans l’affaire ? Voici un rapide résumé.
La destruction de la tribune Claude Papi, point de départ de la catastrophe
Une fois la qualification en demi-finale de la Coupe de France acquise contre Nancy, la direction du club décide de démolir la tribune Claude Papi, et de la remplacer par une gigantesque structure métallique. La raison est simple: faire une recette maximale sur un match qui pourrait envoyer les Bastiais vers la finale de la Coupe de France. La démolition se fait sans aucun permis, dans la nuit du 24 au 25 avril 1992. À la suite du déblayage, la direction du club corse mandate une entreprise niçoise, Sud-Tribunes, pour construire une structure métallique de 9 300 places. Coût de l’opération: 1 million de francs (environ 150 000€). Les travaux commencent le 28 avril. Malheureusement, une grève des dockers du port de Marseille bloque l’envoi des pièces vers la Corse. La compagnie décide alors de se tourner vers des prestataires locaux pour acquérir la structure. Le 29 avril, la commission de sécurité (gendarmerie, pompiers, DDE et Préfecture) inspecte le chantier. Les pompiers émettent de grosses réserves quant à la sécurité. Après 3 réunions, aucun progrès n’est réalisé. La Ligue de football de Corse transmet tout de même à la FFF un avis favorable quant à la tenue de la rencontre. Les billets sont alors mis en vente.
Poursuite des travaux et absence coupable des responsables de la
Préfecture
Un jour avant le début de la demi-finale, les travaux ne sont toujours pas terminés. Des membres de la commission de sécurité se rendent sur le chantier et font part de leur vive inquiétude. Ces derniers inspectent une dernière fois les travaux quelques heures avant le match, alors que les portes du stade sont déjà ouvertes. Pour que la rencontre puisse se tenir légalement, il faut l’aval de la préfecture. Seulement, le Préfet de Haute-Corse, Henri Hurant, et son directeur de Cabinet sont à l’aéroport pour accueillir Bernard Tapie et Émile Zuccarelli (Ministre des Postes et télécommunications). Ces derniers sont donc dans l’incapacité d’apposer leur signature sur le document autorisant la tenue du match.
Le 5 mai 1992 à 20h23: la tribune nord de Furiani s’effondre
La rencontre doit avoir lieu à 20h30. La tribune sur laquelle sont massés les supporters commence à bouger. Pour cause: sur les tubes verticaux de la partie arrière, il manque des diagonales de renfort. De plus, ces derniers reposent sur des cales en bois et des parpaings qui ne sont pas scellés. Un quart d’heure avant le début du match, alors que les supporters trépignent d’impatience, le speaker du stade leur demande à ne pas taper des pieds. Bien entendu, personne ne suit les consignes. À 20h23, la tribune s’effondre. À ce moment-là, les caméras de télévision étaient fixées sur la pelouse. Si elles n’ont pas capté la tragédie en direct, les téléspectateurs ont pu entendre le bruit sourd de l’effondrement. Une scène de panique s’ensuit: les spectateurs envahissent la pelouse et les premiers blessés sont pris en charge. Une demi-heure plus tard, l’évacuation du stade est ordonnée. Les hélicoptères de la sécurité civile arrivent à 21h30. Les blessés sont envoyés vers l’hôpital de Bastia, puis de Nice et Marseille.
Procès de la catastrophe de Furiani: une seule condamnation à de la prison ferme
Le bilan officiel de la tragédie est de 18 morts et 2 357 blessés. Parmi les victimes, il y a 4 journalistes: Michel Vivarelli, Jean-Pierre Giudicelli (France Bleu), Jean-Baptiste Dumas (RTL), Michel Mottier (France Inter). Par solidarité envers les personnes décédées, le match ne sera jamais rejoué. La finale de l’épreuve non plus. Le procès de la catastrophe se déroule en 1995. Le directeur de la société Sud-Tribunes Jean-Marie Boimond est condamné à 26 mois de prison ferme et 6 084 € d’amende pour homicides et blessures involontaires. Michel Lorenzi, le vice-président du SC Bastia a écopé de la même peine en première instance. Il a été reconnu coupable d’être à l’origine du faux procès-verbal. Sa peine a été réduite en appel à 10 mois avec sursis et 3 042 € d’amende. Raymond Le Deun, directeur de cabinet du Préfet, a été relaxé en première instance, mais a finalement écopé de 20 mois avec sursis et 6 084 € d’amende en appel.
Au regard de la gravité des faits, les peines semblent quelque peu clémentes. Yves Bartolini, le représentant de la Ligue corse de football, qui avait signé le document autorisant la tenue de la rencontre, a écopé de 10 mois avec sursis en appel. Il ne s’agit pas de se substituer à la justice, mais les familles des victimes regretteront sans doute que les principaux acteurs institutionnels aient échappé à la prison. Il n’y a guère que le président de Sud-Tribunes qui se soit retrouvé derrière les barreaux.
Crédits photo à la Une: Pierre Bona