Entraîneur de l’Olympique Lyonnais depuis décembre 2015, Bruno Génésio est un paradoxe dans son club car, malgré de bons résultats qui ont notamment vu l’OL atteindre les demi-finales de la Ligue Europa l’an passé, le coach lyonnais est critiqué pour son jeu peu flamboyant et est loin de rentrer dans le cœur de tous les supporters. Mais si beaucoup pointent du doigt Génésio, il convient de se demander si le problème n’est pas situé plus haut dans la hiérarchie du club.
Bruno Génésio, des résultats sans jeu
Cela fait bientôt dix ans que Lyon a été déchu du trône de France, bientôt dix ans que le club rhodanien tente de retrouver une première place qu’il a conquise sept années consécutives dans les années 2000. Et dans un club qui a l’habitude de changer souvent d’entraîneur, la présence toujours effective de Bruno Génésio a de quoi surprendre dans un climat assez tendu entre certains supporters demandant sa démission et une direction qui a décidé de lui faire confiance. Il faut dire que si le jeu lyonnais ne reflète pas les plus belles heures du collectif des années 2000 qui marchait sur la France, il permet tout de même au club d’être toujours présent dans les premières places du classement. Et la performance de l’actuel coach en poste de l’OL dans la deuxième moitié de la saison 2015/2016 fut assez exceptionnelle pour rattraper une phase aller catastrophique sous Hubert Fournier et porter le club à une deuxième place miracle. Finalement, les choses se sont compliquées l’année dernière où l’irrégularité de l’OL n’a pas manqué de remettre fortement en cause la capacité de Génésio à construire une équipe compétitive sur le long terme. Le Génésio en mode « mission sauvetage » n’a finalement jamais été remplacé par un Génésio en mode « mission entraîneur ».
C’est alors que de nombreuses questions ont commencé à émerger tandis que le passé de l’entraîneur lyonnais ne jouait pas pour lui: en effet, il a connu des débuts plutôt difficiles avec deux relégations ou presque avec Villefranche où il sera limogé quatre matches avant la fin de la saison lors de laquelle le club est relégué en DH, puis un limogeage huit mois après son arrivée à Besançon. C’est par la petite porte que Génésio entre dans le staff lyonnais en 2005 où il gravit tous les échelons jusqu’à donc devenir entraîneur principal en décembre 2015. Le fait que Génésio ne soit pas dans le cœur de tous les supporters n’est pas surprenant: dès le début, une pétition avait été lancée à son encontre. Il n’est pas étonnant non plus de voir un scepticisme chez des supporters inquiets pour l’ambition d’un club ayant de très hautes attentes et plaçant un entraîneur inexpérimenté pour combler cette ambition. Au final, la côte de popularité de Génésio allait de pair avec des résultats tantôt corrects tantôt médiocres mais certainement pas avec le jeu proposé et les choix discutables de ce dernier, comme lors du match retour contre l’Ajax en mai dernier lors duquel la titularisation de Cornet, décevant, avait été critiquée par Jean-Michel Aulas en personne sur Twitter, une critique déguisée dans un retweet douteux. Et si finalement, le problème ne venait-il pas d’en haut, au sommet d’une hiérarchie qui ne se remet jamais en cause ?
L’OL, l’institution qui ne se critique pas
Gros problème ? Comme dans toute entreprise qui ne se remet jamais en cause, les relations entre les salariés et la hiérarchie deviennent compliquées. Quoi de meilleur exemple finalement que Maxime Gonalons. Capitaine de l’OL depuis janvier 2013, il avait osé remettre en question l’ambition du club, non conforme à ses propres ambitions. Cela n’avait pas plu à Jean-Michel Aulas et finalement, pour cinq millions d’euros seulement, Gonalons a rejoint l’AS Rome cet été. On distingue un point positif et un point négatif dans cette affaire: le point positif serait que, à l’instar du départ de Bonucci à l’AC Milan, personne n’est au-dessus du club au point de pouvoir devenir plus iconique et symbolique que lui. Néanmoins, cela crée une sorte de jurisprudence qui incite désormais les joueurs lyonnais à être plus prudents au moment d’évoquer la situation de leur club. Dans des moments difficiles, c’est l’union qui doit primer, au détriment finalement de remarques qui peuvent être vraies. Et Gonalons n’avait peut-être pas totalement tord sur le fond. Il y a donc un problème avec Aulas, président emblématique du club décrié ces derniers temps. Si l’on ne peut pas lui enlever son glorieux passé, on peut critiquer certains de ses actes présents.
A commencer par son utilisation intempestive de son compte Twitter sur lequel il n’hésite pas à rembarrer ses propres abonnés, à critiquer les journalistes comme le week-end dernier où les deux Unes de L’Equipe ne lui ont pas plu, à viser ses joueurs comme lors du fameux retweet sur Cornet après OL-Ajax, ou bien à s’en prendre à ses propres homologues comme lors de l’affaire du retweet d’un tweet sur Nasser Al-Khelaïfi montrant un kangourou se grattant les parties intimes, dernière salve en date du dernier combat d’Aulas: le fair-play financier, un combat noble, surtout s’il était mené en concert avec les autres clubs européens. On a donc un président qui ne veut absolument pas se remettre en cause et qui balaye tout ce qui bouge et critique. C’est donc assez naturel de le voir conforter Bruno Génésio. Après tout, c’est Aulas qui l’a intronisé à un moment où il voulait consolider ce projet monté autour des jeunes. Et si Génésio n’a pas été gâté par l’irrégularité de ces jeunes, due souvent à une motivation douteuse de leur part, on peut également lui contester ses choix. Malgré une contestation qui grimpe, Aulas n’a pu révoquer son entraineur car cela aurait été une marque de faiblesse, un désaveu qu’il se serait fait à lui-même, un échec cuisant et un nouveau changement d’entraîneur.
Virer Génésio ?
Disons que c’est trop tard. Il y a eu des périodes l’an passé où l’entraîneur lyonnais n’était vraiment pas en odeur de sainteté, comme après la défaite contre Guingamp à domicile (1-3) ou après le douloureux derby (0-2) fini à neuf. Mais après la demi-finale de Ligue Europa, Génésio a gagné un peu de crédit et le début de saison de l’OL joue plutôt en sa faveur. Cinquièmes avec onze points en six journées, les lyonnais réalisent un bon début de saison même si les lacunes n’ont pas forcément été effacées. Ainsi retrouve-t-on des performances empruntées comme contre Guingamp (2-1) et Limassol (1-1), et des prestations de haut vol comme contre Strasbourg (4-0) ou le PSG dimanche dernier (0-2) malgré une défaite malchanceuse sur deux buts contre son camp: l’OL est l’équipe qui a pour l’instant le plus mis à mal Paris depuis le début de la saison, offrant plus qu’une résistance défensive, un répondant offensif.
Il faudra donc attendre les matches suivants pour se faire une idée, pour voir si Lyon saura maintenir le même niveau qu’il a su trouver contre le PSG ou bien si le club rhodanien retombera dans ses travers d’irrégularité. Les résultats ne suffiront pas toujours à cacher un manque d’identité cruel dans le jeu lyonnais, souvent insipide et manquant de saveur, celle que l’on pouvait déceler dans un Lyon des années 2000 dont les souvenirs provoquent nostalgie et mélancolie chez les supporters. Nul doute que Bruno Génésio n’a aujourd’hui pas le droit à l’erreur, lui qui n’a pas le soutien d’une grande partie du public et de la caste médiatique. Mais s’il est un problème à l’OL, il ne doit pas masquer la présidence aujourd’hui ambiguë de Jean-Michel Aulas qui menace la stabilité et le calme du club lyonnais. Le tout sera finalement de trouver un équilibre interne, avec ou sans Génésio.
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