Alors qu’on ne compte plus les footballeurs prenant le risque de s’exiler en Chine pour l’appât du gain, la Chinese Super League s’impose petit à petit dans l’échiquier du football mondial. Entre raisons politiques sous-jacentes et dessous de table à gogo, Au Stade vous emmène au pays de la décadence footballistique.
Vous avez suivi le mercato hivernal du vieux continent cette semaine ? Alors vous êtes forcément au courant. La « Chinese Super League » a frappé fort ces derniers temps sur le marché des transferts. Après le championnat indien ces dernières années, le championnat chinois est donc devenu LA destination exotique à la mode. Les salaires des joueurs y sont mirobolants, et les clubs vendeurs y trouvent leur avantage en étant grassement indemnisés pour l’achat de leurs joueurs. Des joueurs qui, jusque-là tout du moins, appartenaient à la caste des « joueurs en pré-retraite » – âgés de plus de 30 ans en général. Pourtant, de plus en plus de jeunes joueurs encore frais et compétitifs rejoignent le continent Asiatique.
Chelsea Football Club and Shanghai SIPG have agreed terms for the permanent transfer of Oscar… https://t.co/7izeugHu1J
— Chelsea FC (@ChelseaFC) 23 décembre 2016
Le récent transfert d’Oscar (25 ans, ex-Chelsea) vers le Shanghai SIGP – troisième de la CSL la saison passée – en est le parfait exemple. Il devrait toucher aux alentours de vingt-cinq millions d’euros annuels (soit plus que Cristiano Ronaldo ou Lionel Messi), alors que son transfert aura coûté près de soixante-dix millions d’euros au club de la capitale chinoise – selon les médias britanniques. Il rejoint donc la longue liste de joueurs mondialement connus qui ont sauté le pas: Carlos Tévez (32 ans, ex-Juventus), Ramires (29 ans, ex-Chelsea), Hulk (30 ans, ex-Zénith), Alex Teixeira (26 ans, ex-Chaktar Donetsk) ou encore Jackson Martinez (30 ans, ex-Atlético Madrid). Mais au fait, pourquoi la Chine se trouve tout d’un coup une nouvelle passion dévorante pour le ballon rond ? Décryptage.
Des raisons purement politiques
Le principal facteur de ses dépenses astronomiques sur le marché des transferts se retrouve surement au siège du Parti Communiste Chinois. En effet, Xi Jinping, président de la République Populaire de Chine, a déjà prévu l’avenir footballistique chinois de A à Z. En réalisant en 2011 une ordonnance présentant cinquante points fondamentaux de l’avenir du football en Chine, Xi Jinping (lui-même fan de ballon rond) veut faire de son pays une superpuissance du foot.
Dans ces plans, on retrouve notamment la création de cinquante mille écoles de football dans tout le pays – à l’horizon 2021 -, ou encore la séparation de l’Association Chinoise de Football de la bureaucratie gouvernementale. Toutes ces mesures sont prises avant toutes choses pour voir la Chine se qualifier, ou pourquoi pas accueillir, une Coupe du monde de football dans un futur proche. Rien ne semble impossible quand on constate que la Chine va accueillir les Jeux Olympiques d’Hiver de 2018 à Pyeongchang.
La Chinese Super League équivalente à la Ligue 1
Créée en 2004, la Chinese Super League n’a vraisemblablement rien à envier à notre chère Ligue 1. C’est en tout cas ce qu’affirme Benjamin Gavanon, ancien joueur de Sochaux et de Nancy notamment, qui a passé une saison en Chine, au Shenzhen Ruby, en 2012-2013: « J’ai joué contre plusieurs clubs de L1 chinoise et, franchement, ça vaut la L1 française. Parce que les étrangers relèvent le niveau. Cette année, il y a Guangzhou Evergrande et Shanghai SIPG qui sont très au-dessus. Le reste ne tient pas la route. Mais une équipe de L1 française de milieu de tableau aurait du mal à gagner tous ses matchs là-bas. »
De fortes inégalités salariales persistantes
Des joueurs de classe mondiale, la Chine commence désormais à en posséder. Mais jusqu’aux dernières nouvelles, un match de foot oppose deux équipes de onze joueurs chacune. Et pour le moment, la Chine ne peut pas aligner 22 expatriés sur un même terrain. En conséquence, des joueurs venus d’horizons différents vivent et évoluent dans l’ombre de ces grands joueurs. Tandis que les salaires de ces derniers peuvent être qualifiés de mirobolants, les salaires de leurs coéquipiers sont tout autre: ceux-ci sont rémunérés au niveau du SMIC Français. Un paradoxe.
Parallèlement à ces problèmes d’inégalités salariales, les dirigeants des clubs de D1 Chinoise sont très peu ponctuels quant aux versements de ces salaires, comme le raconte Benjamin Gavanon: « En Chine, ils vous payent un peu quand ils veulent. S’ils décident, d’un coup, de ne plus vous payer, ils peuvent même arrêter pendant un moment. »
Investissement contre crédit politique
Comme le révèle l’AFP, l’investissement de grands groupes nationaux comme « Suning » (une sorte de Darty à la chinoise) au sein de la Chinese Super League, est loin d’être le fruit du hasard. En effet, les PDG de ces grands groupes souhaitent « faire plaisir » à Xi Jinping en exauçant ses rêves de faire de la Chine l’une des plus grandes nations mondiales de foot. Pour cela, ces mêmes PDG investissent des sommes folles dans le foot Chinois pour gagner du crédit auprès de « Xi Dada » (surnom de Xi Jinping, ndlr), et par la même occasion, bénéficier d’avantages et de dessous de table en tous genres. Un business qui ne reflète donc pas vraiment les valeurs premières du football…
Crédits photo à la une: CHELSEAFC.com