Une semaine après le terrible incident de la tribune visiteurs du stade de la Licorne qui a blessé 29 personnes dont six grièvement, l’enquête se poursuit pour déterminer les raisons de ce drame alors que le match Amiens-Lille connaîtra son sort après instruction le jeudi 9 novembre prochain.
Que s’est-il passé au stade de la Licorne ?
Si outre-Manche un drame dans un stade n’est pas sans rappeler celui de Hillsborough en 1989 qui avait coûté la vie à 96 personnes, en France nous avons déjà notre tragédie à nous. La mémoire collective n’a en effet pas pu s’empêcher de penser dès les premières heures après le drame d’Amiens à l’incident de Furiani du 5 mai 1992. Ce jour-là, peu avant le coup d’envoi de la demi-finale de Coupe de France entre Bastia et Marseille, une tribune construite à la hâte avait cédé, tuant 18 personnes et en blessant plus de 2000. A Amiens, heureusement, le bilan n’a pas été aussi lourd, mais il est tout de même conséquent pour un incident arrivant dans l’élite du football français, une élite demandant un minimum d’exigences en matière de sécurité.
Et pourtant, samedi dernier, la sécurité n’a pas été assurée. A la seizième minute du match, Ballo-Touré ouvre la marque et se dirige alors vers la tribune des supporters lillois qui se ruent sur les barrières comme il est coutume de le faire pour n’importe quel supporter lors d’un but marqué. Hélas, une partie des barrières ne tient pas sous la pression de centaines de lillois et ce sont des dizaines d’entre eux qui se retrouvent un mètre et demi plus bas, entassés, littéralement écrasés pour les premiers à terre. Le match est interrompu pour permettre au secours d’intervenir mais face à un bilan, certes non dramatique mais lourd (29 blessés dont 6 graves), la rencontre est définitivement arrêtée et, pour l’instant, reportée.
Chacun se renvoie la balle
Alors que l’enquête est toujours en cours, la polémique, elle, ne pouvait pas attendre. Elle a été déclenchée juste après l’incident. Et dans ces cas-là, personne ne semble coupable. Il n’empêche que si le club est jugé responsable, il risque gros (voir ci-dessous). Le premier à dégainer n’est autre que le président d’Amiens, Bernard Joannin, qui accuse les « 200 ultras [lillois] très énervés », lançant une polémique et provoquant l’indignation de beaucoup, les dirigeants lillois en tête. Ces derniers n’ont pas tardé à réagir en revoyant la balle dans le camp amiénois. Gérard Lopez a déclaré que « des groupes de supporters de Strasbourg, de Marseille, de Nice, ont clairement indiqué que pendant leur passage, l’équipement en question n’était pas hyper solide ». De quoi rajouter de l’huile sur le feu, le stade de la Licorne est en travaux à cause d’une toiture… dangereuse !
La tribune nord avait même été fermée en catastrophe en février 2016 à cause de panneaux de verre qui menaçaient de tomber. Mais pour Joannin, il ne faut pas faire « d’amalgames » entre les travaux en cours et l’incident de samedi dernier. Surtout que la commission de la Fédération française de football et la Ligue de football professionnelle avait validé l’homologation du stade, considéré comme aux normes pour accueillir des matches de Ligue 1 Conforama. Ainsi, la toiture fait débat, elle est en travaux, mais la barrière, elle, n’avait pas été pointée du doigt. Et face aux polémiques multiples qui enflaient, notamment sur les réseaux sociaux où certaines personnes publiques se permettaient des comparaisons plus que douteuses et hasardeuses, c’est finalement Nathalie Boy de la Tour, présidente de la LFP, et Martine Aubry, maire de Lille, qui ont appelé au calme tant que l’enquête ne donnerait pas son verdict.
Quid du match Amiens-Lille ?
Un bilan plutôt important, un match interrompu, des polémiques à tout va: cet Amiens-Lille connaîtra-t-il une fin ? Le mieux serait bien sûr qu’il connaisse une fin sur le terrain. Mais cela est loin d’être acté. Jeudi dernier avait lieu la traditionnelle commission de discipline de la LFP qui a décidé d’ouvrir une instruction en plus de l’enquête « en flagrance pour blessures involontaires » en cours. Le sort du match sera réglé le jeudi 9 novembre prochain et là, plusieurs possibilités s’offrent à la LFP: le match peut être rejoué, normalement et intégralement, sur terrain neutre ou bien au stade de la Licorne mais avec un huis clos partiel ou total, mais il peut également être perdu sur tapis vert au détriment d’Amiens si le club est jugé responsable de l’incident. Nul doute que le club serait alors lourdement sanctionné sur le plan financier en guise de dédommagements. Il apparaît peu probable cependant qu’Amiens se voit retirer des points en plus d’une défaite sur tapis vert. En attendant la décision de la LFP concernant cette rencontre, le prochain match d’Amiens à domicile pose question. Prévu le 21 octobre prochain, Amiens-Bordeaux pourrait être délocalisé, le stade Michel d’Ornano de Caen est évoqué tout comme la possibilité que la rencontre se joue en Gironde. Alain Gest (Les Républicains), président de la métropole amiénoise, lui, a « réclamé la fermeture du stade tant qu’il n’est pas praticable ».
Crédits photo à la une: Julien Bertrand